À l'école de Serralongue
conditions de réutilisation des images
Ça ne vous aura certainement pas échappé : c'est bientôt la rentrée ! Alors, honneur à la classe unique de Serralongue...
Flashback sur 2016. Notre travail en était à ses débuts. Les contours de l'expo étaient encore flous mais nous avons été malgré tout conviés par l'instituteur de la classe unique du village à animer une séance.
Une petite poignée d'enfants entre 6 et 10 ans, dont Julien, notre petit-fils, en CM2.
Aucun n'a pour ancêtre un soldat dont le nom apparaît sur le monument. Avant toutes choses, il nous semblait donc important de resituer ces hommes dans le temps. Auraient-ils pu être un grand-père ? Un arrière-grand-père ? Pas facile à imaginer...
Au fil des années, les élèves ont réalisé une frise du temps qui borde joliment le haut des quatre murs de la salle de classe. Nous nous sommes concentrés sur la période allant de 1800 à nos jours pour placer les ancêtres de Julien. On a commencé à y voir un peu plus clair : c'est donc son arrière-arrière-grand-père qui était parti à la guerre ; le grand-père de son grand-père paternel.
Les questions ont fusé.
Comment il s'appelait ? Il avait quel âge ? Il avait combien d'enfants ? Et il est parti, où ? Est-ce qu'il est revenu de la guerre ?
Il nous a alors fallu rappeler un élément historique : La Moselle (pas toute la Lorraine, contrairement à ce qu'on pense souvent) et les deux départements alsaciens faisaient partie de l'Empire allemand depuis 1871. Hugo était donc allemand. Il avait 37 ans et avait 5 enfants (l'arrière-grand-mère de Julien était un bébé de 4 mois). Nous avons pu reconstituer son parcours grâce aux nombreuses cartes postales qu'il avait envoyées du front. Nous en avions apporté quelques unes et les élèves ont pu reconstituer un puzzle (malheureusement incomplet) de cartes patriotiques, comme bien des enfants, des épouses ou des mères avaient pu le faire 100 ans avant eux. En France, on avait exactement le même genre de cartes.
Hugo était parti en Russie. En Russie ? Oui, en Russie. En effet, les Mosellans et les Alsaciens étaient envoyés sur le front russe car des liens amicaux, voire familiaux pouvaient les unir aux Français qu'ils auraient dû combattre. Rombas, par exemple, est à moins de 10 km de la Meurthe-et-Moselle qui, elle, était restée française. Hugo a eu la chance de revenir en bonne santé d'une guerre où il avait pourtant terriblement souffert du froid.
Mais comment retrouver l'histoire de nos soldats serralonguais quand on ne connaît pas leur famille et qu'on ne dispose d'aucun souvenir ?
On va sur Internet, bien sûr ! Mais comme nous l'ont fait très justement remarquer les élèves : on trouve tout et n'importe quoi sur Internet. Il faut faire attention ! Excellent réflexe ! Nous les avons donc rassurés : les sites consultés sont sérieux, officiels.
Mémoire des Hommes, en particulier, dont les bases de données apportent des renseignements précieux sur les hommes, les historiques régimentaires, les sépultures....
Nous avons donc étudié le cas de Joseph Dunyach. Les enfants ont pu faire les recherches eux-mêmes grâce au matériel informatique (impressionnant, au demeurant !) dont ils disposent.
Grâce à l'historique régimentaire, ils ont retracé son parcours sur GoogleMaps, découvert le lieu où il repose, ont pu constater que dans notre région, les routes sont jalonnées de cimetières militaires... Nous leur avons montré les photos des tombes de Joseph Dunyach et de Pierre Chambon que nous avions prises quelques jours avant.
Julien a parlé des endroits où nous nous étions rendus en été et de notre émotion quand nous avions marché dans les tranchées, traversé le village détruit d'Ornes. L'ossuaire de Douaumont avait été particulièrement marquant aussi.
L'intérêt que les enfants ont montré nous a prouvé que notre travail ne serait pas vain.
Les plus âgés d'entre eux sont maintenant au collège mais il suffira à ceux qui sont encore au primaire de traverser la cour de l'école pour venir découvrir le travail accompli depuis deux ans... et pourquoi pas, aux collégiens de venir nous rendre visite !